VII- Matinée à la clinique
Ce matin, je me suis
réveillée dans une marée de sang, il y en avait partout sur les draps.
Je me suis levée précipitamment pour tout nettoyer. J’ai perdu
tellement de sang que je suis sûre que j’ai perdu mon bébé ce matin.
Je
me suis préparée et rendue à la clinique. J’y ai retrouvé la jeune
fille de la dernière fois et une autre femme qui venaient elles aussi
pour une IVM.
On m’a donné des comprimés à insérer dans mon vagin et une chambre. Je suis restée allonger là sans rien faire de 7h30 à 9h. Puis, une infirmière est venue me mettre une perfusion et un tensiomètre programmé pour prendre ma tension à chaque quart d’heure. Je n’ai pas perdu beaucoup de sang. L’infirmière m’a dit que j’avais dû tout évacuer pendant la nuit.
Restée là sur un lit sans rien faire, un peu affamée et fatiguée, j’ai réussi à m’en dormir. De temps en temps je pensais au bébé. Mais il me semble que j’ai enfoui pas mal d’émotions au fond de moi. Je n’ai pas pleuré. Le gynéco est passé voir les patientes vers 13h et en passant dans chaque chambre, il a débité le même discours rapide et froid. Un peu comme s’il était un ouvrier qui faisait son travail machinalement comme un robot. On m’a donné un rendez-vous pour une prochaine écho, histoire de vérifier si tout était bien parti.
En sortant, je suis
allée prendre la facture et j’ai revu la jeune fille qui était entrée
avec moi. Elle avait les traits tirés, les yeux vides et tristes, elle
était assise au fond de la salle et semblait pétrifiée. J’aurai voulu
lui parler, je me suis à plusieurs reprises, tournée vers elle mais
elle évitait mon regard. Je regrette de ne pas lui avoir dit un mot
mais ce n’est pas évident d’entamer une conversation comme ça. Peut
être qu’on se retrouvera pour l’écho. Je voudrais l’aider.
Je viens de vivre la même chose qu'elle mais peut être que j’y étais mieux préparée et que j’y avais mûrement réfléchi.
Pour
une fois, je n’étais pas seule, mon ami est venu me chercher à la
clinique. J’aurai aimé partager les événements concernant ce bébé avec
lui mais comme il est très sensible, il a refusé d’y être impliqué
d’une façon ou d’une autre. Il a même refusé de voir les échos. Ça m’a
fait un peu mal mais je l’ai accepté, il ne voulait pas s'attacher à ce
petit être et je le comprends.
Pour l'instant je me trouve
terriblement forte, j'encaisse bien le coup et je commence à réfléchir
à ce que je dois faire maintenant, est-ce que je dois me débarasser de
tous mes souvenirs (échos, résultats...etc)? Je ne sais pas, j'ai
encore le temps d'y penser.